Culture
Nicolas Demorand : « Je démissionne de Libé à cause des jeux de mots en une »
Le directeur de Libération claque la porte. Nicolas Demorand dit avoir « atteint son seuil de tolérance ». Celui qui dirigeait le journal depuis mars 2011 a annoncé ce matin qu’il quitterait son poste d’ici la fin de semaine. En cause : les célèbres jeux de mots mis en Une et qui ont petit à petit installé une marque « Libé ». Et cette patte Libé, Demorand n’en peut visiblement plus. Interrogé par le Gorafi, il revient sur sa décision et son agacement des calembours en tous genres.
Le directeur de Libération claque la porte. Nicolas Demorand dit avoir « atteint son seuil de tolérance ». Celui qui dirigeait le journal depuis mars 2011 a annoncé ce matin qu’il quitterait son poste d’ici la fin de semaine prochaine. En cause : les célèbres jeux de mots mis en une et qui ont petit à petit installé une marque « Libé ». Et cette patte Libé, Demorand n’en peut visiblement plus. Interrogé par le Gorafi, il revient sur sa décision et son agacement des calembours en tous genres.
Une obsession de la rédaction
« Je peux encaisser beaucoup de choses. Les conflits sur le choix des sujets, les clashs avec les salariés à propos de la réduction des effectifs ou encore un traitement de l’information parfois pas super déontologique, mais les jeux de mots qu’on met en une…je peux plus. » nous annonce d’entrée l’ancien de France Inter arrivé à Libération il y a 2 ans. Le directeur de Libé parle d’une « obsession qui règne dans toute la rédaction et qui rend les journalistes comme possédés. »
Il aura donc fallu à peine 24 mois à Nicolas Demorand pour craquer sous la pression des jeux de mots incessants et parfois médiocres. Pourtant, il le reconnaît, il est entré au journal en connaissance de cause : « Je savais que le jeu de mot faisait partie de l’ADN du journal. Avant que j’arrive ils en avaient déjà fait des balèzes. Il y avait eu « L’Europe fait la fine Bush », « FN : Le Pen prône la solution filiale » ou encore « Congrès : le râteau de Versailles ». Mais je n’imaginais pas que c’était à ce point…»
Le journaliste parle d’une pratique qui sature les locaux de Libération : « C’est tout le temps, partout. Et pas qu’en Une. À la machine à café, au parking ou aux toilettes. Pas un endroit où l’on n’entende pas un jeu de mots, certes sympa, mais pas non plus top top ». Une marque de fabrique qui a laissé Demorand psychologiquement sur les rotules en tout juste 2 ans malgré une volonté évidente de tenir bon de son côté.
Mais les jours passent et les unes aussi. Le directeur de la rédaction subit sans broncher, malgré « quelques coups plus durs que les autres », raconte t-il : « Y’a eu des jeux de mots difficiles à gérer pour moi. Comme par exemple celui sur Gérard Depardieu et son exil en Belgique pour lequel on a mis « Le Manekken Fisc ». Y’a eu aussi celui sur la mort du chanteur Daniel Darc. Là on a balancé « Darc en ciel ». Très dur à vivre celui-là. »
Une institution impossible à réformer
Celui qui se dit victime d’un acharnement confie qu’il a pourtant essayé de changer les choses mais parle aussi de son échec : « J’ai tenté de calmer cette folie du jeu de mot. Pas totalement les supprimer mais juste réduire leur nombre. Mais à chaque fois que j’ai abordé le sujet en réunion, j’ai eu le Syndicat National des Journalistes et les actionnaires principaux de Libé qui me sont tombés dessus. »
Deux ans après son arrivée à Libération, Nicolas Demorand affirme vouloir prendre de « très longues vacances ». Quant à son avenir dans le journalisme, il reste pour le moins vague : « J’adore ce métier. Vraiment. Mais les unes de Libé m’ont tout simplement vidé de toute énergie. J’ai un peu perdu la foi. Alors je vais me reposer et si je dois retravailler en tant que journaliste, je veux que ce soit dans une rédaction qui fasse son travail d’information mais sans plus. Une rédaction normale quoi. »
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