Sports
MotoGP : le Grand Prix de Malaisie remporté par un livreur de Sushi Shop
Malaisie – Tout sourire à la première marche du podium, Hugo Da Costa n’en revient toujours pas. Nouvel espoir de l’écurie Yamaha, le Français courait hier encore pour une tout autre équipe, celle du restaurant Sushi Shop de la rue du Cherche-Midi, à Paris. Retour sur un destin fulgurant.
Un soir de janvier 2015, en retard sur une commande, un scooter en livrée noire et blanche déboule plein gaz sur le boulevard du Montparnasse. L’engin virevolte entre les taxis à 65km/h, évite un Noctilien de justesse avant de passer allègrement au rouge. Un piéton déjà engagé l’insulte, le pilote l’ignore. Poignet dans l’angle, genou à terre, le scooter s’engage en trombe dans la rue de Sèvres. Le pot frotte l’asphalte, les étincelles jaillissent. Hugo jubile. Les california rolls sont méconnaissables et la sauce soja s’écoule du top-case, mais lui se sent terriblement en vie. Dans le 15e arrondissement désert, il se lâche. Trottoirs, contresens, dérapages, feux oranges « bien mûrs », tout y passe. Et lorsqu’une grosse cylindrée blanche vient se ranger à côté de lui à l’angle de la rue de Lourmel, il s’imagine déjà en garde à vue.
Vincent Thommeret, fraîchement nommé directeur Yamaha France, l’a pris en chasse depuis quelques rues déjà. Sans un mot, il tend sa carte au jeune homme livide, et repart à fond de 3ème dans la nuit. A partir de là, tout s’enchaîne encore plus vite qu’une série de feux rouges un soir de 14 juillet. Essais, apprentissage accéléré, qualifications. Deux mois plus tard, Hugo plaque définitivement son Peugeot Ludix débridé pour un prototype de 1100 cm3. Botte secrète de Vincent Thommeret pour la saison à venir, celui-ci couve jalousement son poulain. « Il a un style bien à lui, tout en prise de risques complètement irresponsables. Du coup les autres coureurs préfèrent le laisser passer », confie-t-il. « Ses années Sushi Shop ont constitué une formation inestimable ».
Pas de permis de conduire, uniquement un BSR acheté à la sauvette en 2007
14 courses plus tard, le team Yamaha France caracole en tête du GP 2015. Surnommé « le kamikaze » en référence à son CV, Da Costa s’est rapidement imposé comme une pièce maîtresse de l’écurie – en dépit des réticences de la Fédération quant au fait qu’il ne possède pas de permis de conduire, seulement un BSR acheté Porte de Clignancourt en 2007.
Malgré les succès, le futur champion n’oublie pas ses origines. Avant la fin d’une carrière qu’il craint courte, il aimerait même combiner les deux mondes en créant une entreprise de coursiers en Ducati de 190 chevaux.
Et quand on lui rappelle que la vitesse est limitée à 50km/h en ville, il se contente d’hausser les épaules en souriant d’un air gourmand.
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